Le rapport 2025 d’UBS sur les grandes fortunes mondiales met en lumière un changement de cap stratégique. Entre craintes d’un choc commercial global, retour de l’inflation et tensions géopolitiques, les family offices réorientent leurs allocations vers des actifs plus liquides et des zones développées.
Des risques plus complexes, des arbitrages plus prudents
Le climat économique mondial reste instable. Et pour les family offices – ces structures chargées de gérer le patrimoine des grandes fortunes – la géopolitique redevient centrale. Selon le dernier Global Family Office Report publié début 2025 par UBS, 70 % des répondants identifient une guerre commerciale mondiale comme le principal risque à court et moyen terme.
Cette inquiétude dépasse même celle d’une inflation persistante ou d’un conflit armé international, cités par respectivement 63 % et 58 % des gestionnaires interrogés. Pourtant, dans ce contexte de tensions accrues, 59 % des family offices conservent une tolérance au risque identique à 2024, misant davantage sur la diversification que sur le repli.
Un net rééquilibrage des portefeuilles
Face à ces risques, les grandes fortunes adoptent une posture de prudence active. La stratégie consiste à privilégier les actifs liquides et les zones jugées stables. En 2025, la part allouée aux actions de marchés développés devrait passer de 26 % à 29 %, avec un fort tropisme pour l’Amérique du Nord (notamment les États-Unis) et l’Europe occidentale. À l’inverse, les investissements en private equity – placements non cotés à plus long terme et moins liquides – reculent de 21 % à 18 %.
La priorité donnée à la liquidité s’explique par la volonté de pouvoir réagir rapidement en cas de choc macroéconomique. D’autant que le cycle des hausses de taux semble toucher à sa fin, ce qui rend certains placements à revenu fixe plus attractifs à court terme.
Des stratégies de couverture de plus en plus sophistiquées
La gestion du risque ne passe plus seulement par la diversification géographique ou sectorielle. Les family offices adoptent aussi des outils techniques. Ainsi, 31 % intègrent des hedge funds dans leur allocation – ces fonds flexibles capables de se couvrir contre les baisses de marché. 19 % investissent également dans les métaux précieux, principalement l’or, en tant que valeur refuge.
Parallèlement, les actifs « alternatifs » restent prisés, mais de manière plus sélective : l’immobilier tertiaire est délaissé au profit des infrastructures durables, et les investissements directs dans des start-up technologiques sont davantage filtrés selon leur capacité à générer rapidement du chiffre d’affaires.
Transmission : un défi encore sous-estimé
Si la gestion du portefeuille financier est largement professionnalisée, la question de la transmission intergénérationnelle reste un point faible. Seul un family office sur deux déclare disposer d’un plan de succession formalisé. Les enjeux fiscaux, culturels et éducatifs rendent la tâche complexe.
Préparer la nouvelle génération à la gestion du patrimoine, organiser la gouvernance familiale, anticiper les donations transfrontalières… autant de chantiers souvent repoussés mais jugés stratégiques pour la pérennité du capital.
Cap sur 2030 : innovation, stabilité et vision long terme
En dépit des turbulences, les family offices conservent une approche de long terme. Les secteurs les plus prisés à horizon 2030 restent : l’intelligence artificielle, les énergies renouvelables, la santé/longevité et les infrastructures numériques. Des domaines jugés à la fois porteurs en termes de rendement et alignés avec les tendances sociétales lourdes.
Ces investisseurs discrets mais puissants cherchent avant tout à concilier résilience, rendement et transmission, dans un monde où les certitudes d’hier sont désormais fragiles.
Sources : UBS Global Family Office Report 2025 (Actusite, 28 mai 2025).